Le péril bleu
Le Péril bleu commence comme un roman policier, teinté d’une satire de Sherlock Holmes: autour du Grand Colombier, dans la campagne du Bugey, la nuit, des monuments sont vandalisés, des arbres étêtés, des bêtes et des gens disparaissent. Ceux qu’on appellent les “Sarvants” (un terme du folklore des Alpes et du Jura désignant les lutins) semblent séquestrer et voler toutes choses et êtres. La police est sur les dents, la terreur s’installe dans un climat de superstition campagnarde, faisant croire à des sortes de gnomes ou de kobolds. L’intrigue se noue autour d’une famille bourgeoise et savante, la fille d’un astronome étant enlevée. Ses prétendants se lancent à sa poursuite, diverses hypothèses s’affrontant.
Le dénouement s’effectue sur une centaine de pages : les « Sarvants » se révèlent être les habitants invisibles de la surface libre située au sommet de l’atmosphère, à 50 000 mètres au-dessus de la Terre, donc largement au-dessus de l’atmosphère respirable, partageant la Terre avec les humains et explorant avec leur vaisseau ce qui leur apparaît comme un vaste océan couvrant la planète : l’atmosphère terrestre. Ils y pêchent des créatures qu’ils étudient, dissèquent, classifient, conservent et exposent dans des musées, jusqu’à ce qu’ils découvrent par hasard que ces êtres sont capables de souffrir et de penser. Magnanimes, les Sarvants décident de mettre un terme à leurs expériences. Ce faisant, ils se montrent finalement plus “humains” que les humains eux-mêmes (notre rapport aux autres espèces animales et à la vivisection est évoqué dans le livre).
Le roman est remarquable à la fois parce qu’il décrit des êtres plus avancés que l’espèce humaine et aussi en raison du traitement non-anthropomorphique de ces créatures de la haute atmosphère (les Sarvants ressemblent à des araignées invisibles), qui rappelle La guerre des vampires de Gustave Le Rouge (1909). (source Wikipédia)
Extraits :
Sous prétexte d’ethnographie, on se livre, au jardin d’Acclimatation, à des exhibitions de sauvages qui rappellent assez l’aérium des sarvants. CH XV
Reflétant la conviction nationale, qu’il partageait, le ministre de la Guerre proposa d’examiner sans ambages les moyens les plus sûrs, expéditifs et radicaux, de détruire les continents sus-aériens. Il ajouta qu’il importait de le faire au plus tôt, avant que les sarvants n’eussent construit de nouveaux aéroscaphes. Il parla de mortiers colossaux et de projectiles explosifs — et se vit couper la parole.
Le ministre des Colonies l’interrompait, et lui demandait de quel droit bombarder ce pays qu’on pourrait sans doute, avec le temps, conquérir, annexer peut-être et, à tout le moins, gratifier d’un protectorat. Le pire qu’il s’autorisait à prévoir, c’était le massacre des indigènes, encore qu’il eût été préférable, à son sens, de les asservir. Mais dévaster de fond en comble la terre invisible ? Jamais ! Il devait y avoir là-haut des richesses inconnues fort appréciables. Pour son compte, il caressait l’espoir que la France, un jour, s’augmenterait de cette belle possession plus étendue que toute la surface qu’on voit sur les mappemondes. CH XVI
ISBN : 978-2-37952-027-3
Éditions Opoto, avril 2019
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